Faire vivre la laïcité, c’est faire vivre la liberté.
La loi de 1905, une loi de liberté que nous avons collectivement construite. Chaque fois que se produit un acte terroriste, comme ce fut le cas cette année après l’assassinat de Samuel PATY ou encore l’attentat de Nice, la laïcité est convoquée pour rappeler que depuis 115 ans, c’est elle qui nous permet de vivre ensemble dans le respect des croyances, des convictions philosophiques ou politiques des uns et autres. Et c’est bien l’intolérance et le refus de cette liberté qui animent ceux qui perpétuent les actes terroristes au nom d’une religion dévoyée. La laïcité est le résultat d’un long combat pour la liberté commencé avec la révolution française pour aboutir à la loi de 1905 qui, en séparant les églises et l’État, a permis à chacun d’être libre de croire ou de ne pas croire, dans le respect des convictions des uns et des autres.
La France est une République indivisible, laïque démocratique et sociale. La Ligue de l’enseignement a contribué pour une large part à ce long combat émancipateur. Une loi est un aboutissement, mais encore faut-il la faire vivre au quotidien pour qu’elle ne reste pas un catalogue de bonnes intentions désincarnées.
La loi de 1905 garantit les mêmes droits. Elle est juste, puisqu’elle s’adresse à tous et garantit à chacun les mêmes droits quels que soient les croyances, les doutes ou l’absence de croyance qui peuvent nous habiter. Elle ne s’adresse pas à quelqu’un en particulier mais considère chaque être humain comme un maillon de l’humanité alors que la religion, même si elle relie celles et ceux qui la partagent au nom d’une même conception du sacré ne peut pas relier celles et ceux qui en partagent une autre, qu’ils soient athées ou agnostiques. Ainsi la loi de 1905 n’est pas une loi de l’athéisme. Au contraire, elle permet à chacune et à chacun de pratiquer une religion ou de ne pas en pratiquer. En étant dans le préambule de la constitution, elle est un principe républicain, un cadre juridique dans lequel peuvent s’exprimer et se vivre toutes les convictions spirituelles, philosophiques et politiques. C’est la laïcité qui nous relie, qui nous permet de nous rassembler et vivre les valeurs du triptyque républicain liberté, égalité, fraternité.
La loi de 1905 sépare le politique du religieux. En séparant ce qui relève du religieux qui est de l’ordre individuel et ce qui relève du politique qui est de l’ordre du collectif, elle permet aux pouvoirs publics de garantir à tout un chacun un traitement égal pour l’exercice d’un culte, pour vivre en toute liberté et égalité nos différences de genre, d’orientation sexuelle ou d’origine ethnique. Elle garantit ainsi la protection de la diversité et crée les conditions d’une vie collective apaisée respectueuse des identités de chacun. Elle est le rempart contre toutes les intolérances, le racisme, la xénophobie et la haine de l’autre. La loi de 1905 est donc le socle législatif qui garantit à la fois la liberté mais aussi un traitement égal des différentes sensibilités de notre société. Elle permet de nous rassembler toutes et tous dans un lieu commun dénommé République.
L’urgence d’une République sociale. Pour nous rassembler vraiment, Jean Jaurès avait exprimé que la République est laïque et sociale mais elle restera laïque si elle sait rester sociale. Pourtant, en France les inégalités se sont accrues au cours des dernières décennies à tel point que selon l’observatoire des inégalités : « les Français les 10 % les plus aisés touchent 6,7 fois plus que les 10 % les plus pauvres. Aujourd’hui, la France est, après la Suisse, le pays d’Europe où les riches sont les plus riches. Les 1 % les plus fortunés de notre pays possèdent 17 % de l’ensemble du patrimoine des ménages et si l’on prend les 10 % les plus riches, c’est presque la moitié ». Dans ces conditions, comment croire au triptyque républicain quand on vit dans des ghettos urbains, des zones rurales paupérisées, désertés par les services publics, lorsque la pauvreté explose, que les inégalités se renforcent et que l’ascenseur social est en panne. C’est sur ce terreau que les intégristes de tout poil trouvent matière pour remettre en cause la laïcité, pour proposer un modèle intolérant qui parfois est le seul espoir pour des esprits fragiles en recherche de sens. Bien sûr, tous les terroristes ne sont pas nés dans les ghettos urbains, mais ce qui est inquiétant, c’est qu’ils trouvent un écho favorable parmi les jeunes de ces quartiers.
Faire vivre la laïcité, c’est prendre en compte la nécessité de rendre notre système plus juste. Il faudra que la part la plus aisée de notre population accepte de cotiser un peu plus à l’impôt, que les bénéfices soient taxés un peu plus et que nous nous donnions les moyens pour empêcher l’exil fiscal des 100 Milliards d’euros qui manquent cruellement tous les ans pour mener une politique sociale conforme aux idéaux républicains. C’est ainsi que nous aurons les moyens nécessaires pour lutter contre la désertification des services publics dans certains quartiers, pour donner à la vie associative et à l’éducation populaire reconnaissance et moyens qui doivent être à la hauteur des enjeux du vivre ensemble où chacun pourra vivre concrètement les valeurs de l’idéal Républicain.
Comme l’affirmait Jaurès « arrêtons de parler d’égalité, il est temps de faire des égaux » !
Agir pour la laïcité. A notre niveau, nous n’avons pas le pouvoir de décision qui permet d’engager les nécessaires réformes, mais nous agissons au quotidien pour réduire les inégalités d’accès à l’éducation, à la culture, aux vacances et aux loisirs. Nous créons des espaces d’éducation et de formation de l’esprit afin que chacun puisse appréhender la complexité du monde. Nous travaillons aussi massivement pour faire en sorte que les acteurs éducatifs et associatifs se réapproprient et fassent vivre la laïcité au cours du temps de la semaine de la laïcité, moment visible de nos actions au quotidien. Pour la neuvième année consécutive, nous rassemblons les acteurs de notre réseau dans la mise en œuvre d’actions autour de la laïcité. Cette année est certes particulière, mais l’engagement de notre réseau ne s’est pas essoufflé. Nous soutenons près de 200 initiatives qui permettent aux habitants de notre département de faire vivre la laïcité comme un cadre qui protège et émancipe. C’est un chantier qui doit sans cesse être renouvelé. Si nous avions pu le croire acquis comme une évidence, les évènements douloureux vécus ces dernières années nous rappellent qu’il ne peut y avoir de relâche. Il est nécessaire d’investir massivement les espaces d’éducation, les lieux culturels, les quartiers populaires, les départs en séjour de vacances collectifs, les classes de découverte, pour que ces lieux de mixité et de vivre ensemble permettent de développer l’ouverture d’esprit.
L’éducation populaire un investissement pour l’avenir … Lutter contre les discriminations, faire vivre la laïcité pour ne plus se retrouver désarmé lors des attaques terroristes est une nécessité impérieuse. Prévenir ne se voit pas, ne se mesure pas électoralement. C’est un investissement sur le long terme qui nécessite de faire des choix politiques clairs et de les assumer. Alors que c’est dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville qu’il faudrait investir massivement, le désengagement de l’État et certaines collectivités prive les associations d’éducation populaire de moyens d’agir. Par contre, le département du Pas-de-Calais conscient de cet enjeu apporte depuis sa création un soutien significatif aux 200 initiatives de la semaine départementale de la laïcité. Une loi qui réprime ne coûte rien il est vrai, seulement quelques débats et une image médiatique. Elle permet bien sûr de traiter les conséquences mais les causes restent et demeurent. Les mouvements d’éducation populaire, l’éducation nationale peuvent agir au long cours sur les causes à condition de leur donner les moyens d’agir durablement dans les territoires où peu à peu l’idéal républicain s’éloigne.
Pour reprendre Robert Escarpit, enseignant, journaliste et écrivain : La laïcité, c’est la disponibilité universelle du patrimoine humain, c’est la loi qui veut que chaque homme soit maître de son bien et que son bien se trouve partout où il y a des hommes.
Daniel BOYS
Président de la Fédération du Pas-de-Calais
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